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Indésirables du Brésil : la promesse reniée faite aux réfugiés vénézuéliens

Gerson Scheidweiler
Gerson ScheidweilerIl est directeur de recherche de l’Observatoire national des femmes en politique (ONMP) au Brésil. Il est titulaire d’un doctorat en communication politique de l’Université de Brasilia et se spécialise dans les politiques de genre en Amérique latine. Gerson Scheidweiler travaille également en tant que conseiller en communication au Secrétariat des femmes de la Chambre des députés brésilienne. Depuis 2011, il rédige et suit l’évolution des lois sur le genre et les droits des femmes ; il conseille les femmes parlementaires pour améliorer leurs stratégies de communication.
Tyler Valiquette
Tyler ValiquetteIl est titulaire d’une maîtrise en sciences politiques de l’Université de Guelph. Il est expert en droits LGBTQI+ au Brésil. Il a précédemment enseigné à l’Université de Brasilia où il est actuellement membre du groupe de recherche sur « l’Internet et les droits de l’Homme ». Il est également doctorant à l’University College de Londres.
Yvonne Su
Yvonne SuElle est professeure adjointe au département des études sur l’équité de l’Université York. Ses recherches portent sur la migration forcée, la migration homosexuelle, la pauvreté et l’inégalité. Yvonne Su est titulaire d’un doctorat de l’Université de Guelph et d’une maîtrise de l’Université d’Oxford.

S’appuyant sur une enquête, cet article soutient que, malgré la promesse du Brésil d’accueillir favorablement les demandeurs d’asile vénézuéliens, le pays reste hostile aux migrants, en particulier ceux issus de la communauté LGBTQI+.

En Amérique latine, le Brésil fait figure de leader dans l’avancée des droits LGBT (lesbiennes, gays, bisexuels et transgenres). Le pays a légalisé le mariage homosexuel, mis en œuvre une législation qui protège les couples de même sexe et adopté une législation anti-discrimination LGBT. Le Brésil est également connu pour être un pays accueillant pour les migrants. En 2019, avec un geste qui a été salué dans le monde entier, le Brésil a reconnu des milliers de demandeurs d’asile vénézuéliens comme réfugiés prima facie[1]Personne reconnue comme réfugiée, par un État ou le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), sur la base de critères objectifs liés aux circonstances de son pays … Continue reading. Depuis 2014, plus de 5,4 millions de personnes ont quitté le Venezuela en raison de la violence, de la persécution et de la pauvreté, et 1,6 million d’autres Vénézuéliens devraient être déplacés d’ici la fin de 2021[2]Inter-Agency Coordination Platform for Refugees and Migrants from Venezuela, Regional Refugee and Migrant Response Plan January-December 2021, 2021, https://www.r4v.info/en/document/rmrp-2021. En mars 2021, 261 000 personnes s’étaient installées au Brésil[3]Mrittika Shamsuddin et al., “Integration of Venezuelan Refugees…”, op. cit..

Cependant, bien que le Brésil soit présenté comme un État progressiste pour les personnes LGBT et les migrants, il existe un paradoxe entre la politique et la pratique. La montée d’une rhétorique anti-genre, anti-gay, nationaliste et populiste fait du Brésil un endroit dangereux pour les communautés LGBT et les réfugiés. La situation s’est aggravée avec l’élection du président de droite Jair Bolsonaro. Son pouvoir repose sur un mouvement de droite composé de politiciens et de leaders religieux qui soutiennent le programme nationaliste, anti-LGBT et anti-genre de Bolsonaro. L’émergence de la Covid-19 a intensifié la situation en exacerbant les tensions politiques et les inégalités sociales, entretenues par une rhétorique populiste. Le président Bolsonaro a rapidement qualifié la Covid-19 de « petit rhume » et alimenté la désinformation sur les vaccins et les produits pharmaceutiques[4]Terrence McCoy and Heloísa Traiano, “Brazil’s Bolsonaro, channeling Trump, dismisses coronavirus measures –  it’s just ‘a little cold’”, The Washington Post, 25 March 2020, … Continue reading. En octobre 2021, avec 600 000 décès, le Brésil se situait au deuxième rang mondial pour le nombre total de décès liés à la Covid-19[5]World Health Organization, WHO Coronavirus (COVID-19) Dashboard, November 2021, https://covid19.who.int.

Ainsi, nous soutenons que, malgré son image de leader régional des droits LGBT et sa promesse de reconnaître et d’accueillir les réfugiés vénézuéliens sur une base prima facie, le Brésil reste hostile aux demandeurs d’asile, aux réfugiés et aux migrants, en particulier ceux issus de la communauté LGBTQI+ (QI : queer et intersexes). Cette situation est soutenue par le fort mouvement de réaction aux droits LGBTQI+ dirigé par le président Bolsonaro. En outre, les attaques nationalistes et populistes contre les mesures de santé publique dans le cadre de la pandémie ajoutent encore à la précarité des réfugiés LGBTQI+.

Retour de bâton pour les LGBTQI+ et la question du genre au Brésil

Depuis les années 1990, les mouvements LGBTQI+ et féministe d’Amérique latine ont travaillé ensemble pour faire progresser leurs droits[6]Marlise Matos, “Gender and Sexuality in Brazilian Public Policy: Progress and Regression in Depatriarchalizing and Deheteronormalizing the State”, in Elisabeth Jay Friedman (ed.), Seeking Rights … Continue reading. Récemment, au Brésil, ces mouvements se sont concentrés sur l’intégration du genre dans les politiques publiques, la légalisation du mariage homosexuel et les lois sur l’identité de genre[7]Elisabeth Jay Friedman (ed.), Seeking Rights from the Left: Gender, Sexuality, and the Latin American Pink Tide, Duke University Press, 2018.. Cependant, ces progrès ont été accompagnés d’une augmentation des violences envers ces communautés. Depuis 2017, 1 431 personnes LGBTQI+ sont mortes de manière violente[8]Genilson Coutinho, “Relatório do GGB revela crescimento de assassinatos de travestis e transexuais em 2020”, Dois Terços, 14 mai 2021, … Continue reading. Les universitaires affirment que ce repli est mené par un mouvement né en réaction au succès du mouvement féministe et LGBTQI+[9]Robert Tyler Valiquette, “The Politics of Homophobia in Brazil: Congress and Social (counter)Mobilization”, University of Guelph Library, June 2017, … Continue reading. Ce mouvement réactionnaire rassemble plusieurs partis politiques, dont le Mouvement Brésil Libre (MBL), qui se livre à des attaques anti-LGBTQI+ et anti-féministes[10]Leigh A. Payne and Andreza Aruska de Souza Santos, “The Right-Wing Backlash in Brazil and Beyond”, Politics & Gender, vol.16, no.1, March 2020.. En outre, l’Église évangélique est un important groupe engagé dans une rhétorique tout aussi hostile[11]Omar Guillermo Encarnación, Out in the Periphery: Latin America’s Gay Rights Revolution, Oxford University Press, 2016.. Avec ses alliés au Congrès, elle contribue à diriger le principal groupe – connu sous le nom de Bibles, Bullets, and Bison (BBB) – qui rassemble des religieux évangéliques, des propriétaires terriens et des militaires. Par conséquent, toute législation visant à aider la communauté LGBTQI+ ou mentionnant seulement le terme « genre » se heurte à des obstacles importants au Congrès.

« Depuis 2017, 1 431 personnes LGBTQI+ sont mortes de manière violente. »

 

Lors des élections de 2018, la campagne de Bolsonaro pour la loi et l’ordre s’est emparée de la rhétorique nationaliste et populiste prêchée par des politiciens, des chefs d’église, des propriétaires terriens et des groupes paramilitaires pour s’organiser face aux « menaces » provenant des groupes LGBTQI+ et féministes[12]Leigh A. Payne and Andreza Aruska de Souza Santos, “The Right-Wing Backlash…” art. cit.. Son slogan de campagne « Le Brésil au-dessus de tout, Dieu au-dessus de tous » l’a positionné comme un leader de droite aux valeurs conservatrices. Pendant l’élection, Bolsonaro s’est attaqué à ce qu’il a appelé « l’idéologie du genre », qui détruirait les valeurs de la société[13]Ariel Alejandro Goldstein, “The New Far-Right in Brazil and the Construction of a Right-Wing Order”, Latin American Perspectives, vol.46, no.4, p.245-262, 2019.. Ce programme de la droite est soutenu par des groupes d’extrême droite qui ont l’intention de rétablir l’ordre traditionnel des sexes[14]Ibid.. Pour ce mouvement, Bolsonaro était le candidat idéal à l’élection présidentielle, car il s’en prend fréquemment aux communautés LGTBQI+ et féministes. Par exemple, en 2014, il a déclaré à une membre du Congrès : « Je ne vous violerais pas parce que vous n’en êtes pas digne ». Et, en 2013, il a proclamé qu’il était « fier d’être homophobe[15]Mariana Simões, “Brazil’s Polarizing New President, Jair Bolsonaro, in His Own Words”, The New York Times, 28 October 2018. ». La montée en puissance du mouvement anti-LGBTQI+ et anti-genre a conduit à un rejet de la communauté LGBTQI+, ce qui a eu un impact sur les réfugiés qui en étaient issus. La faible réponse du gouvernement a transformé le Brésil en un « gigantesque enfer » en pleine pandémie, ajoutant à la précarité des réfugiés[16]Yvonne Su, Tyler Valiquette and Yuriko Cowper-Smith, “Surviving Overlapping Precarity in a ‘Gigantic Hellhole’: A Case Study of Venezuelan LGBTQI+ Asylum Seekers and Undocument Migrant in … Continue reading.

Le populisme anti-santé publique en hausse au Brésil

Depuis l’adoption de la Constitution de 1988, le Brésil a établi que « la santé est un droit fondamental et une responsabilité de l’État[17]Adriano Massuda et al., “The Brazilian health system at crossroads: progress, crisis and resilience”, BMJ Global Health, 2018, https://gh.bmj.com/content/bmjgh/3/4/e000829.full.pdf. » Pour appliquer ce droit, la Constitution a créé le « système de santé unifié » (Sistema Único de Saúde – SUS en portugais), le système de santé entièrement financé par l’État le plus étendu au monde[18]“Brasil é único com ‘SUS’ entre países com mais de 200 milhões de habitantes”, Folha de S. Paulo, 10 octobre 2019, … Continue reading. Dès son introduction, le SUS a amélioré l’accès de la population à la santé. Cependant, une crise économique et politique combinée à des politiques d’austérité a impacté ce système. Cela a été exacerbé par la mise en œuvre d’un programme néolibéral après la destitution de la présidente Dilma Rousseff en 2015[19]Adriano Massuda et al., “The Brazilian health system…”, art. cit. et renforcé par l’élection de Jair Bolsonaro en 2018[20]Ernesto Londoño and Letícia Casado, “A Collapse Foretold: How Brazil’s COVID-19 Outbreak Overwhelmed Hospitals”, The New York Times, 31 May 2021, … Continue reading.

Lorsque la pandémie a atteint le Brésil, Bolsonaro a nié les possibles impacts sanitaires, et écarté des mesures préventives de santé publique qui, selon lui, auraient eu des conséquences négatives sur l’économie. Dans un discours officiel daté du 24 mars 2020, alors que le Brésil comptait 904 cas et onze décès, Bolsonaro a accusé les médias de propager l’hystérie[21]“‘Gripezinha’: leia a íntegra do pronunciamento de Bolsonaro sobre covid-19”, UOL, 24 mars 2020, … Continue reading. Il a employé un argument nationaliste selon lequel la flambée du nombre de décès en Italie, du fait d’une population italienne plus âgée et des différences climatiques, ne pouvait pas se produire au Brésil. Usant de désinformation, Bolsonaro a publiquement rejeté des recommandations de santé publique pourtant fondées sur des preuves scientifiques[22]Julie Ricard and Juliano Medeiros, “Using misinformation as a political weapon: COVID-19 and Bolsonaro in Brazil”, Harvard Kennedy School Misinformation Review, vol.1, no.2, April 2020, p.1-8, … Continue reading. Plus tard, en mars 2020, avec 2 915 cas et soixante-dix-sept décès, Bolsonaro a utilisé la ferveur nationaliste pour illustrer la résilience des Brésiliens à repousser le virus en déclarant : « Les Brésiliens peuvent sauter dans les égouts sans que rien ne leur arrive »[23]Francisco Ortega and Michael Orsini, “Governing COVID-19 without government in Brazil: Ignorance, neoliberal authoritarianism, and the collapse of public health leadership”, Global Public Health, … Continue reading.

« Pendant l’élection, Bolsonaro s’est attaqué à ce qu’il a appelé “ l’idéologie du genre ”, qui détruirait les valeurs de la société. »

 

La motivation de Bolsonaro était de faire fonctionner l’économie à tout prix et d’éviter les blocages pour plaire à ses plus fidèles partisans : les conservateurs et les propriétaires d’entreprises. Bolsonaro s’est même tourné vers la Cour suprême pour empêcher les États et les municipalités de mettre en place des mesures préventives, en vain[24]Delis Ortiz et Fernanda Vivas, “Bolsonaro aciona STF contra três decretos estaduais que impõem restrições a fim de conter Covid”, Portal G1, 25 mai 2021, … Continue reading. Poussé à l’action par les tribunaux, contre l’avis des experts en santé publique, le gouvernement fédéral a investi massivement dans l’acquisition de traitements inefficaces contre la Covid-19, comme l’hydroxychloroquine. Bolsonaro a également politisé l’acquisition de vaccins, prenant à plusieurs reprises une position nationaliste contre les vaccins « communistes » produits en Chine, tout en accusant cette dernière d’être responsable de la pandémie[25]Daniel Gullino, “Veja 10 vezes em que Bolsonaro criticou a CoronaVac”, O Globo, 18 janvier 2021..

Malgré cela, le 10 novembre 2020, alors que le pays comptait 5 700 044 cas et 162 829 décès, Bolsonaro a employé une insulte homophobe en déclarant que le Brésil devait cesser d’être « un pays de poules mouillées » et faire face au virus[26]Gabriela Oliva, “251 mil mortes por Covid: Relembre as falas de Bolsonaro sobre a pandemia”, Poder 360, 26 février 2021, … Continue reading. Il a à nouveau utilisé le terme péjoratif « chochotte » pour décrire les porteurs de masque. Dans une autre tentative de détourner l’attention des gens de la gravité de la pandémie, Bolsonaro a affirmé que « la mort était le destin inévitable de chacun.[27]Ibid. ». À aucun moment lors de la pandémie, il n’a montré la volonté de suivre l’avis des experts en santé publique. Près de deux ans après le début de la pandémie, il continue de privilégier la protection de l’économie, au détriment de la protection des personnes.

L’absence de leadership de la part du gouvernement fédéral a créé des conflits entre les différents niveaux de gouvernement, alors que des disputes idéologiques opposent les partis anti-confinement et pro-hydroxychloroquine aux groupes pro-confinement et pro-vaccins. Même le SUS, qui avait fait ses preuves par le passé, n’a pas pu contrôler la politisation de la pandémie. Son incapacité à fonctionner efficacement a eu un impact sur tous les Brésiliens, mais plus encore sur les réfugiés et les demandeurs d’asile, lesquels n’avaient pas accès à une assurance maladie privée, avaient des difficultés à obtenir des informations et étaient à la merci d’un système de santé surchargé, dans un contexte xénophobe et homophobe.

L’impact sur les réfugiés

La faiblesse de la réponse du gouvernement brésilien à la Covid-19 a placé une population déjà précaire dans une situation de vulnérabilité profonde. Notre enquête auprès de cinquante-six demandeurs d’asile, réfugiés et sans-papiers vénézuéliens à Manaus, entre juin et juillet 2021, a révélé trois éléments-clés. D’abord, ces personnes ont été confrontées à davantage de violence physique au Brésil en raison de leur orientation sexuelle et de leur identité de genre pendant la pandémie. Ensuite, elles estiment que la réponse du gouvernement brésilien est inadéquate. Enfin, beaucoup d’entre elles ont contracté la Covid-19.

Avant la pandémie, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants vénézuéliens étaient déjà confrontés à la xénophobie – y compris dans ses manifestations violentes – tandis que les membres de la communauté LGBT étaient confrontés à l’homophobie et à la transphobie[28]Shannon Van Sant, “Venezuelan Refugees Face Violence And Closed Borders As They Try To Flee”, NPR, 20 August 2018, … Continue reading. Nos entretiens préliminaires avec huit demandeurs d’asile vénézuéliens en 2019 avaient déjà révélé que certains avaient été exploités et « traités comme des esclaves » par leurs employeurs en raison de leur nationalité, qu’une transsexuelle avait été battue par des hommes parce qu’elle était « trans », et que la police avait ignoré son cas parce qu’elle était vénézuélienne[29]Ibid.. Notre enquête, menée en 2021, montre qu’en comparant leur situation avant et pendant la pandémie, on constate une augmentation de 8 % du nombre de victimes de violence physique chez les personnes interrogées, une augmentation de 6 % de la violence liée à l’orientation sexuelle et une augmentation de 6 % de la violence liée à l’identité de genre. Jane*[30]Des pseudonymes ont été utilisés afin de protéger l’identité des personnes interrogées., une transsexuelle, a raconté avoir été volée sous la menace d’une arme, et Liz*, une autre transsexuelle, a déclaré être au chômage « parce que les employeurs disent que les LGBT ont provoqué la Covid-19. » Notre travail de terrain a en effet révélé que la désinformation, qui accuse les LGBT d’être les responsables de la propagation de la Covid-19, a contraint les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants LGBT à cacher leur identité LGBT.

« Avant la pandémie, les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants vénézuéliens étaient déjà confrontés à la xénophobie. »

 

Lorsqu’on leur a demandé d’évaluer la réponse du gouvernement brésilien à la pandémie, 55 % des personnes interrogées ont estimé qu’elle était inadéquate. Soixante-huit pour cent des personnes interrogées ont bénéficié du fonds d’urgence du gouvernement, mais la plupart d’entre elles ont estimé que ce fonds n’était pas suffisant et ont souhaité qu’une aide plus importante soit apportée. Les 32 % des personnes interrogées n’ayant pas reçu d’aide (dix-huit personnes au total) ont expliqué qu’elles avaient été disqualifiées car elles n’avaient pas de papiers ou ne savaient pas comment formuler une demande. Les personnes interrogées ont également déclaré qu’il fallait davantage les protéger de la Covid-19, par exemple via des campagnes d’éducation et de vaccination. Il est choquant de constater que 45 % des personnes interrogées ont contracté la Covid-19 et trois répondants (9 %) l’ont contractée deux fois. Mateo*, un demandeur d’asile vénézuélien homosexuel, a raconté qu’il avait contracté la Covid-19 la première fois dans le cadre de son emploi dans un hôtel, et la seconde fois dans le cadre de son deuxième emploi de serveur. Les personnes LGBTQI+, en particulier les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants, sont plus susceptibles d’occuper des postes dans le secteur des services en contact avec les gens – ce qui les expose au virus. En même temps, il s’agit de l’un des groupes les moins prioritaires pour la vaccination au Brésil, et seules six personnes interrogées (10 %) ont déclaré avoir été vaccinées. En outre, en raison d’un manque d’information sur la Covid-19 et l’efficacité des vaccins, 13 % des personnes interrogées ont exprimé leur opposition à la vaccination.

Le Brésil s’est forgé une réputation de pays progressiste pour les personnes LGBTQI+ et les réfugiés, en adoptant une législation spécifique pour aider ces deux groupes. Cependant, la montée d’un mouvement puissant contre les droits LGBT, dirigé par le nationaliste Bolsonaro, alimente une réaction brutale à leur encontre. La Covid-19 a aggravé le problème, entraînant une plus grande précarité pour les Vénézuéliens LGBTQI+. Nos résultats montrent que les réfugiés LGBT au Brésil sont confrontés à plus de précarité et à une augmentation de la violence et des risques sanitaires en raison de la pandémie. Par conséquent, il existe une contradiction entre politiques et pratiques, illustrée dans la façon dont les demandeurs d’asile, les réfugiés et les migrants LGBTQI+ vénézuéliens sont traités au Brésil.

Traduit de l’anglais par Benjamin Richardier


ISBN de l’article (HTML) : 978-2-37704-891-5

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References

References
1 Personne reconnue comme réfugiée, par un État ou le Haut-Commissariat des Nations unies pour les réfugiés (HCR), sur la base de critères objectifs liés aux circonstances de son pays d’origine, qui justifient une présomption qu’elle répond aux critères de définition de réfugié applicable : https://ec.europa.eu/home-affairs/pages/glossary/prima-facie-refugee_en ; Voir aussi Mrittika Shamsuddin et al., “Integration of Venezuelan Refugees and Migrants in Brazil”, Policy Research Working Paper no.9605, March 2021, https://reliefweb.int/sites/reliefweb.int/files/resources/Integration-of-Venezuelan-Refugees-and-Migrants-in-Brazil.pdf
2 Inter-Agency Coordination Platform for Refugees and Migrants from Venezuela, Regional Refugee and Migrant Response Plan January-December 2021, 2021, https://www.r4v.info/en/document/rmrp-2021
3 Mrittika Shamsuddin et al., “Integration of Venezuelan Refugees…”, op. cit.
4 Terrence McCoy and Heloísa Traiano, “Brazil’s Bolsonaro, channeling Trump, dismisses coronavirus measures –  it’s just ‘a little cold’”, The Washington Post, 25 March 2020, https://www.washingtonpost.com/world/the_americas/brazils-bolsonaro-channeling-trump-dismisses-coronavirus-measures–its-just-a-little-cold/2020/03/25/65bc90d6-6e99-11ea-a156-0048b62cdb51_story.html ; Tom Phillips, “Brazil: Bolsonaro reportedly uses homophobic slur to mock masks”, The Guardian, 8 July 2020, https://www.theguardian.com/world/2020/jul/08/bolsonaro-masks-slur-brazil-coronavirus
5 World Health Organization, WHO Coronavirus (COVID-19) Dashboard, November 2021, https://covid19.who.int
6 Marlise Matos, “Gender and Sexuality in Brazilian Public Policy: Progress and Regression in Depatriarchalizing and Deheteronormalizing the State”, in Elisabeth Jay Friedman (ed.), Seeking Rights from the Left: Gender, Sexuality, and the Latin American Pink Tide, Duke University Press, 2018, p.144-172.
7 Elisabeth Jay Friedman (ed.), Seeking Rights from the Left: Gender, Sexuality, and the Latin American Pink Tide, Duke University Press, 2018.
8 Genilson Coutinho, “Relatório do GGB revela crescimento de assassinatos de travestis e transexuais em 2020”, Dois Terços, 14 mai 2021, https://www.doistercos.com.br/relatorio-do-ggb-revela-crescimento-de-assassinatos-de-travestis-e-transexuais-em-2020
9 Robert Tyler Valiquette, “The Politics of Homophobia in Brazil: Congress and Social (counter)Mobilization”, University of Guelph Library, June 2017, https://atrium.lib.uoguelph.ca/xmlui/bitstream/handle/10214/11509/Valiquette_RobertTyler_201708_MA.pdf?sequence=1&isAllowed=y
10 Leigh A. Payne and Andreza Aruska de Souza Santos, “The Right-Wing Backlash in Brazil and Beyond”, Politics & Gender, vol.16, no.1, March 2020.
11 Omar Guillermo Encarnación, Out in the Periphery: Latin America’s Gay Rights Revolution, Oxford University Press, 2016.
12 Leigh A. Payne and Andreza Aruska de Souza Santos, “The Right-Wing Backlash…” art. cit.
13 Ariel Alejandro Goldstein, “The New Far-Right in Brazil and the Construction of a Right-Wing Order”, Latin American Perspectives, vol.46, no.4, p.245-262, 2019.
14 Ibid.
15 Mariana Simões, “Brazil’s Polarizing New President, Jair Bolsonaro, in His Own Words”, The New York Times, 28 October 2018.
16 Yvonne Su, Tyler Valiquette and Yuriko Cowper-Smith, “Surviving Overlapping Precarity in a ‘Gigantic Hellhole’: A Case Study of Venezuelan LGBTQI+ Asylum Seekers and Undocument Migrant in Brazil amid COVID-19”, The Statelessness & Citizenship Review, vol.3, no.1, p.155-162, 2021.
17 Adriano Massuda et al., “The Brazilian health system at crossroads: progress, crisis and resilience”, BMJ Global Health, 2018, https://gh.bmj.com/content/bmjgh/3/4/e000829.full.pdf
18 “Brasil é único com ‘SUS’ entre países com mais de 200 milhões de habitantes”, Folha de S. Paulo, 10 octobre 2019, https://www1.folha.uol.com.br/cotidiano/2019/10/brasil-e-unico-com-sus-entre-paises-com-mais-de-200-milhoes-de-habitantes.shtml
19 Adriano Massuda et al., “The Brazilian health system…”, art. cit.
20 Ernesto Londoño and Letícia Casado, “A Collapse Foretold: How Brazil’s COVID-19 Outbreak Overwhelmed Hospitals”, The New York Times, 31 May 2021, https://www.msn.com/en-in/money/topstories/a-collapse-foretold-how-brazil-s-covid-19-outbreak-overwhelmed-hospitals/ar-BB1f2bWM
21 “‘Gripezinha’: leia a íntegra do pronunciamento de Bolsonaro sobre covid-19”, UOL, 24 mars 2020, https://noticias.uol.com.br/politica/ultimas-noticias/2020/03/24/leia-o-pronunciamento-do-presidente-jair-bolsonaro-na-integra.htm
22 Julie Ricard and Juliano Medeiros, “Using misinformation as a political weapon: COVID-19 and Bolsonaro in Brazil”, Harvard Kennedy School Misinformation Review, vol.1, no.2, April 2020, p.1-8, https://misinforeview.hks.harvard.edu/wp-content/uploads/2020/04/ricard_misinformation_weapon_brazil_20200417.pdf
23 Francisco Ortega and Michael Orsini, “Governing COVID-19 without government in Brazil: Ignorance, neoliberal authoritarianism, and the collapse of public health leadership”, Global Public Health, vol.15, no.9, 2020, p.1257-1277.
24 Delis Ortiz et Fernanda Vivas, “Bolsonaro aciona STF contra três decretos estaduais que impõem restrições a fim de conter Covid”, Portal G1, 25 mai 2021, https://g1.globo.com/politica/noticia/2021/05/27/bolsonaro-aciona-stf-contra-tres-decretos-estaduais-que-impoem-restricoes-a-fim-de-conter-covid.ghtml
25 Daniel Gullino, “Veja 10 vezes em que Bolsonaro criticou a CoronaVac”, O Globo, 18 janvier 2021.
26 Gabriela Oliva, “251 mil mortes por Covid: Relembre as falas de Bolsonaro sobre a pandemia”, Poder 360, 26 février 2021, https://www.poder360.com.br/1-ano-de-covid-no-brasil/251-mil-mortes-por-covid-relembre-as-falas-de-bolsonaro-sobre-a-pandemia
27 Ibid.
28 Shannon Van Sant, “Venezuelan Refugees Face Violence And Closed Borders As They Try To Flee”, NPR, 20 August 2018, https://www.npr.org/2018/08/20/640350156/venezuelan-refugees-face-violence-and-closed-borders-as-they-try-to-flee; Wilder Alejandro Sanchez, “Venezuelan Refugees in Brazil: Is Xenophobia Replacing Kindness?”, Providence, 19 September 2018, https://providencemag.com/2018/09/venezuelan-refugees-in-brazil-is-xenophobia-replacing-kindness
29 Ibid.
30 Des pseudonymes ont été utilisés afin de protéger l’identité des personnes interrogées.

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